Pourquoi lire des livres ?

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"Huîtres fouet huîtres ?"

En 1920, perdu dans une salle de classe de sa campagne natale, Théodore s'ennuie. 
1920 est une année magnifique, il n'y avait ni ordinateurs, ni téléphones, ni même la moindre once d'onde électronique pour corrompre l'esprit de nos petites têtes blondes. Les enfants allaient gaîment à l'école en pataugeant dans la boue pour entendre leur professeur, dans un français approximatif emprunt d'accent de patois, leur parler de mathématiques, de culture française et leur ouvrant des univers peuplés de légendes, de monstres et de mythes. 
Théodore rêvait à d'autres choses. Il n'était pas grand amateur de mathématiques ou d'Histoire, mais ce qu'il avait particulièrement adoré en CP c'est qu'on leur avait remis un premier livre. 
C'est fabuleux un livre, c'est  un écrivain avec une plume trempée d'encre qui avait essayé de mettre un univers, une histoire, des idées dans une seul petit livre. Quand le jeune garçon était arrivé pour se servir dans la grande caisse en bois sur le bureau du maître, il avait pris celui avait un dessin de marionnette, "Les Aventures de Pinocchio" et il en frissonnait encore. C'était une histoire phénoménale pleine de rebondissements que notre petit blond du fin fond de la France avait adoré. Tandis que le professeur maniait les chiffres comme un dresseur montrant des animaux monstrueux, Théodore rêvait à la petite marionnette de bois qui l'attendait sur son chevet
"Todore, huîtres fouet huîtres ? Vous m'écoutez ?"
Théodore leva la tête, et avec un sourire malicieux répondit 
"Je ne sais pas monsieur, j'ai trop peur de me tromper"
Il n'avait strictement aucune idée de quoi parlait l'adulte sévère qui l'avait interrogé, trop pris dans ses rêveries.
" huîtres fouet huîtres. 64, vous m'coutez j'ne homme ?"
"- Oui bien sur monsieur"

Et il sentait son nez le picoter. Déjà dès son jeune âge le petit Théodore était pris au visage par son imagination et tout ça grâce à un inconnu qui des millénaires avant lui avait voulu compter ses chèvres. 
C'est la magie de la lecture.



Lettre à la langue française

Chère langue française


                Faisant suite aux nombreuses remarques auxquelles j’ai eu droit vous concernant, je vous écris aujourd’hui pour me plaindre de tous les maux dont vous m’accablez à votre insu quotidiennement.  Jusqu'à aujourd’hui, vous m’avez certes très bien servi et je ne saurais me passer de vous pour exprimer mes idées, tant les nombreuses nuances qu’offrent chacun de vos mots permettent d’avoir un panel complet pour servir mes besoins de communications. Parmi les autres langues je n’ai d’ailleurs pas su, je vous l’avoue, vous trouver un substitut vous arrivant ne serait-ce qu’à la cheville.
                Cependant, si je me plains aujourd’hui, c’est que je suis exaspéré par la véhémence de vos défenseurs. Toujours prêt à surgir pour faire la peau du malheureux qui aura eu l’outrecuidance de faire un faux pas sur le sentier ardu que vous présentez.
Par pitié vous qui êtes mon amie fidèle depuis si longtemps, restez accessible au novice que je suis.

Je reste votre éternel serviteur

Matthieu